Daniel Fasquelle, Président du groupe d’études autisme à l’Assemblée nationale dénonce un grave recul de la prise en charge des enfants autistes à la suite de l’adoption d’un amendement dans le cadre de la loi Peillon
L’amendement 274, déposé par des députés de la majorité présidentielle et voté en première lecture dans le cadre de la Loi sur la Refondation de l’école par l’Assemblée Nationale, marque un très grave recul par rapport à la Loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
Cet amendement est destiné, en effet, à donner aux enseignants le pouvoir de solliciter eux-mêmes la MDPH afin de réévaluer l’aide humaine dont peuvent bénéficier certains enfants handicapés. Ce droit était, jusqu’à présent, réservé aux parents.
L’Education Nationale reprend donc clairement la « main » pour pouvoir, à tout moment, intervenir et faire revoir l’orientation ou les modalités d’accueil des enfants handicapés. Les difficultés innombrables que les parents rencontrent sur le terrain pour faire valoir le droit de leurs enfants, en particulier des enfants autistes, à l’éducation leur font craindre, à juste titre, que cet amendement soit la porte ouverte à une exclusion encore plus facile au moindre problème et une évacuation vers des structures médico-sociales inadaptées qui ont déjà des délais d’attente exorbitants. C’est un retour rapide à la situation antérieure, c’est à dire une déscolarisation sans solution, que prépare en réalité cet amendement, déposé par des députés pour la plupart issus du service public de l’éducation nationale, un amendement adopté en catimini avec le soutien du ministre Peillon.
La solution est brutale.
Les arguments invoqués sont également particulièrement choquants. Il est ainsi expliqué que « La loi du 11 février 2005 a favorisé le développement rapide de la scolarisation en milieu ordinaire des enfants et adolescents en situation de handicap ».
Comment laisser croire que tout est réglé alors que seulement 20 % des enfants atteints de troubles autistiques sont scolarisés en France contre 80 % chez nos voisins européens (et encore, uniquement dans le cycle pré-élémentaire et élémentaire et souvent à temps partiel très réduit) ?
Quant à la mise en avant de l’intérêt du « payeur » qui parce qu’il assume l’accueil de l’enfant peut décider de le conserver ou non, c’est-à-dire de l’Education nationale, il est particulièrement déplacé dans le contexte présent. De plus, il nie le rôle essentiel des parents, premiers éducateurs de leur enfant, et tend à leur retirer le peu de pouvoir décisionnaire qui leur était garanti par la loi du 11/2/2005.
L’école de la République est le lieu premier où doit s’exercer la pleine citoyenneté des enfants en situation de handicap. La France à un retard considérable qu’elle devrait plutôt s’attacher à rattraper. L’Europe a ainsi déjà constaté à plusieurs reprises que notre pays ne respecte pas le droit d’accès des enfants autistes à l’enseignement tel qu’il est reconnu à l’article 15§1 de la Charte des droits sociaux qui prévoir que l’égalité d’accès à l’enseignement (ordinaire et spécial) soit effectivement garantie aux personnes handicapées.
A quoi sert d’avoir ratifié la Convention ONU des Droits des Personnes Handicapées, dont l’article 24 dit explicitement : “Les Etats Parties font en sorte que le système éducatif pourvoie à l’insertion scolaire à tous les niveaux” si c’est pour accepter aujourd’hui un pareil recul ?
Daniel Fasquelle, Député UMP du Pas de Calais et Président du Groupe d’études autisme