Pour ou contre les cahiers de vacances pendant l’été ?

Les premiers cahiers de vacances ont été inventés en 1933 par les éditions Magnard à Guéret, dans la Creuse. Depuis, c’est un devenu un marché juteux tant en termes d’éditions physiques de cahiers qu’en termes de supports dématérialisés sur le net soit via des applications ou des sites.

Roger Magnard justifiait la création de ces fameux cahiers de vacances « pour permettre aux enfants de sauver de l’oublie quelques-unes des notions essentielles apprises en classe tout en les récompensant de l’effort fourni. » Lui qui espérait en vendre 6 à 7 000 exemplaires le premier été en a écoulé 50 000 !

Aujourd’hui, l’esprit des tous premiers cahiers inventés par Roger Magnard n’a pas changé : ils restent ludiques tout en faisant réviser les notions fondamentales.

Un marché florissant

Il se vend plus de 4,5 millions de cahiers de vacances par an dont 75 % sont achetés entre le 15 juin et le 15 juillet, avant même que les enfants ne soient en vacances ! Les parents y sont attachés, les enfants beaucoup moins semblerait-il, puisque moins de 25 % sont terminés avant la rentrée scolaire, pour autant, ils demeurent le symbole des vacances estivales.

Une offre toujours plus variée

L’offre est pléthorique ! Des cahiers, des dvd, des sites en ligne, des applications à télécharger sur les tablettes… Il est difficile d’échapper aux sollicitations ès matière. Cette offre, constamment renouvelée et toujours plus inventive, semble en « légitimer » l’usage auprès des parents pendant les vacances voire durant la période scolaire.

L’école est finie, les enfants ont besoin d’une pause

A peine l’école terminée, faut-il demander à nos enfants de faire des pages desdits cahiers tous les jours ou presque ? A contrario, est-il préférable de les laisser faire une pause en se disant que l’année scolaire a été exigeante et que ce ne sont pas quelques semaines de vacances qui vont leur faire oublier les notions acquises pendant l’année. Sans réelle coupure, comment peuvent-ils faire la différence entre l’année qui se termine et celle qui va commencer ?

Les cahiers de vacances : pour qui et pour quoi faire ?

Quand ils ne sont pas demandés par les enfants, leur utilité parait limitée. La question qui consisterait à se demander si leur existence n’aurait pas pour but essentiel de rassurer les parents qui ont peur que leur progéniture oublie pendant l’été tout ce qu’elle a appris pendant l’année scolaire, peut se poser !
Les parents d’élèves en difficulté les considèrent comme des soutiens pour permettre aux enfants en échec de tenter de surmonter leurs lacunes et de minimiser le stress au moment de la rentrée. Mais n’y va-t-il pas autre chose à faire et à partager avec les enfants pendant les vacances ?

Si les enfants n’ont pas eu de difficultés particulières pendant l’année, pourquoi oublieraient-ils tout ou partie en deux mois ? Et quand bien même ils auraient eu du mal avec l’une ou l’autre des notions qui seront encore au programme de la classe supérieure, est-il nécessaire d’emmener l’école en vacances, au risque de les décourager ? Faut-il maintenir les enfants dans le même rythme, avec les mêmes enjeux et la même pression, qu’au cours de l’année ?

Quelle est leur efficacité ?

Seuls les enfants qui terminent leur cahier de vacances ont de meilleurs résultats que ceux qui ne l’ont pas fait. Il faut vraiment aller jusqu’au bout du cahier de vacances pour en tirer un bénéfice, or une étude menée par l’Iredu montre que seulement 23,4 % des enfants les terminent alors que 72,2 % ne s’en sont servi que partiellement et que 3 % ne les ouvrent même pas ! Les auteurs-chercheurs Jean-Pierre Jarousse et Christine Leroy-Audouin en concluent que « les enfants qui ne vont pas au bout du cahier ne progressent pas plus qu’en enfant qui n’a pas travaillé pendant l’été. »

Apprendre autrement pendant les vacances

Et s’il y avait des façons différentes d’accéder au savoir en période « non scolaire » ? Et si le plaisir d’apprendre sans s’en apercevoir un peu à l’instar de Monsieur Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir entrait en ligne de compte ? Et si les parents acceptaient de considérer qu’apprendre en lisant tout simplement, en regardant autour de soi, en jouant, en visitant une ville, un monument, une exposition, un musée, en pratiquant un sport, en partant à l’aventure à l’occasion de géocaching par exemple… étaient des façons comme les autres d’acquérir des connaissances ?

Les visites d’un musée, d’un château médiéval, d’un site archéologique, ou encore d’un édifice religieux valent bien des cours d’histoire, non ? Se lancer dans un match de foot intergénérationnel doit bien équivaloir à quelques cours d’éducation civique et de sport sur le savoir-vivre ensemble, la solidarité et le dépassement de soi ? Faire lire à vos enfants un livre qu’à leur âge vous avez aimé et échanger vos impressions peut remplacer une lecture suivie en cours de français ? L’observation d’un insecte, d’un oiseau, d’un arbre fruitier en pleine production au bord d’un chemin peuvent s’apparenter à quelques leçons de  SVT ?

Et les exemples peuvent se multiplier à l’envi : tout peut être prétexte à compter, à décrire ses journées de vacances dans un journal de voyage dont le seul objectif serait d’inciter les enfants à écrire, sans s’arrêter à l’orthographe, la grammaire et la conjugaison, juste pour leur donner l’envie.

Et si les vacances étaient finalement l’école de la vie, le temps d’un moment bien identifié, pendant lequel relâcher un peu la pression ne ferait de nous ni des parents laxistes ni des parents démissionnaires ? Les enfants peuvent s’enrichir de tellement d’autres choses, autrement, avec plaisir et sans pression pendant l’été ! Et si pendant les vacances, vous montriez à vos enfants qu’ils peuvent apprendre en toutes circonstances sans avoir comme contrainte de noircir des pages de cahier de vacances ?

Anne Vaneson-Bigorgne

 

Pour en savoir plus : Le marché des cahiers de vacances en quelques chiffres 

  • Plus de 4,5 millions ont été vendus en 2015
  • Le prix moyen est de 6,10 euros
  • Le cycle primaire représente 46 % du chiffre d’affaires des cahiers de vacances
  • La plus forte croissance est enregistrée pour le lycée et notamment à pour les élèves de seconde, même si pour cette tranche d’âge l’offre est moins importante que pour les plus jeunes
  • L’anglais et le français sont les matières plébiscitées lorsque le cahier de vacances n’est pas un tout-en-un
  • Les cahiers de vacances qui mettent en scène des personnages issus de licences connaissent une progression plus importante que les cahiers plus traditionnels

 

Publié le 24 juillet 2018 par Anne Vaneson-Bigorgne

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