Les émissions de radio ne mâchent pas leurs (gros) mots aux heures de grande écoute !

A l’heure où le débat sur la liberté d’expression en France est relancé, 3d Communication a étudié durant une semaine le contenu de deux émissions de radio phare diffusées à heure de grande écoute. Les résultats ont permis d’esquisser un nuage de (gros) mots qui tombent parfois dans nos oreilles de sourds, mais n’échappent pas à celles de jeunes enfants.

L’écoute de programmes comme « On va s’gêner » (Europe 1) et « Les Grosses Têtes » (RTL) a conduit 3d Communication, agence conseil en relations publics et en stratégie d’influence, à un constat : le contenu des émissions de radio diffusées à heure de grande écoute ne respecte pas toujours la directive du CSA, qui préconise qu’« aucun service de radiodiffusion sonore ne doit diffuser, entre 6h et 22h30, de programmes susceptibles de heurter la sensibilité des auditeurs de moins de 16 ans » (délibération du 10 février 2004 relative à la protection de l’enfance et de l’adolescence à l’antenne des services de radiodiffusion sonore).

Un mot d’ordre : « merde » !
Programmées à heure de grande écoute familiale, « On va s’gêner » et « Les Grosses Têtes » rassemblent près de 3,5 millions d’auditeurs, auxquels s’ajoutent 2 millions de téléchargement de podcasts (source Médiamétrie). Diffusées à l’heure des sorties de classe (15h30/18h00 pour la première et 16h00/18h00 pour la seconde), ces émissions sont écoutées par de nombreux parents, désormais habitués à ce fond sonore familier, dans la voiture sur le trajet du retour à la maison ou dans la cuisine pendant le goûter de leurs petits protégés.

Mais si les adultes écoutent bien souvent d’une oreille distraite, rien n’échappe aux enfants qui, en avalant leur goûter, ne perdent pas une miette des propos vulgaires qui s’échappent du poste de radio. Dans ces deux émissions, « merde » et « con » trônent ainsi en tête du classement, tandis que « putain » et « chier » se disputent ardemment la troisième place. Suit ensuite un vulgaire peloton de « couilles », de « conneries » et de « ferme ta gueule ».

La directive du CSA en deux mots
Le CSA prévoit que la radiodiffusion sonore de programmes susceptibles de heurter la sensibilité des jeunes auditeurs doit se faire après 22h30. « On peut donc se poser la question des créneaux horaires et de la cible d’auditeurs visée », déclare Alexis Noal, directeur associé de l’agence 3d Communication. « Pour rappel, et ceci est loin d’être anecdotique, les émissions en question sont des émissions enregistrées et éditées par leurs stations respectives. Il ne s’agit donc pas de dérapages accidentels, mais bien de choix éditoriaux assumés. »

Il faut aussi savoir que le CSA n’intervient pas avant diffusion. Il examine en revanche toutes les plaintes adressées par courrier, dès lors que ces plaintes mentionnent le nom de la station et l’horaire de diffusion ou le titre du programme. Systématiquement, le Conseil procède à l’écoute du programme incriminé, rédige un dossier si cela s’avère nécessaire et, après examen de celui-ci par le groupe de travail « Jeunesse et protection des mineurs », statue sur les éventuelles décisions à prendre.
Il arrive en effet fréquemment dans ces émissions que les conversations des chroniqueurs et de leurs invités tournent autour de questions relatives à la sexualité ou à la consommation d’alcool. Mais le caractère informatif et pédagogique n’est pas toujours l’élément dominant et laisse parfois place à un humour plus ou moins subtil, qui n’est pas forcément en adéquation avec l’âge des éventuels auditeurs, qu’ils soient de jeunes enfants ou des adolescents.

Le dernier mot aux parents ?
Mais finalement, le but n’est pas seulement de savoir si une telle vulgarité a sa place sur les ondes. Il est indéniable que les parents ne devraient pas seulement s’inquiéter du vocabulaire des cours de récréation et qu’il convient aussi à chacun d’être responsable et de choisir les programmes adaptés à ses enfants. « Ce que les Français ne laisseraient pas passer à la télévision ne les choque plus à partir du moment où cela est dit à la radio, comme si le vecteur oral était moins impactant que le visuel », ajoute Alexis Noal.

Pourtant, même sans l’image, les mots remettent parfois en question la notion de dignité de la personne humaine, ce qui s’avère susceptible de heurter la sensibilité des mineurs en raison de leur crudité, voire de leur obscénité. Comme l’explique le CSA, « de tels propos peuvent nuire à l’épanouissement physique, mental ou moral des plus jeunes. Si les adultes peuvent aisément prendre de la distance vis-à-vis de ce type de propos, les adolescents et les préadolescents, par nature plus vulnérables, risquent d’être perturbés par de telles représentations, d’où la nécessité de prévoir une diffusion après 22h30. »
Il s’agit peut-être de se poser sérieusement la question de ce qui est acceptable ou non dans le paysage culturel et éducatif français, mais les parents seront finalement les seuls juges de ce qui constitue une atteinte à la sensibilité de leurs enfants.

Publié le 24 mai 2012 par Anne Vaneson-Bigorgne

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